De nouvelles recherches, menées par des scientifiques des universités de Bordeaux et du Michigan, suggèrent que les Néandertaliens avaient un régime alimentaire plus diversifié que ce que l'on croyait, incluant potentiellement la consommation de larves de mouches, aussi appelées asticots. Publiée dans la revue Science Advances, cette découverte remet en question l'idée prédominante selon laquelle les Néandertaliens étaient exclusivement des hypercarnivores. Les analyses isotopiques de l'azote (N-15) sur des restes fossiles de Néandertaliens ont révélé des niveaux élevés, indiquant une consommation de viande supérieure à celle des grands prédateurs comme les lions ou les hyènes. Cependant, cette observation soulevait une énigme: les humains ne peuvent pas digérer de telles quantités de protéines sans risquer l'empoisonnement par les protéines, une condition connue sous le nom de « maladie du lapin ».
En 2017, l'anthropologue John Speth de l'Université du Michigan a avancé l'hypothèse que les Néandertaliens auraient pu consommer de la viande partiellement décomposée, infestée d'asticots. Pour tester cette idée, la biologiste Melanie Beasley a mené une étude sur deux ans au Forensic Anthropology Center du Tennessee. Ses recherches ont montré que si les niveaux d'azote dans les tissus humains en décomposition augmentaient modestement, ils étaient considérablement plus élevés dans les asticots qui s'y développaient. Ces larves, riches en N-15, pourraient expliquer les signatures isotopiques élevées observées chez les Néandertaliens. Cette découverte trouve un écho dans des récits ethnohistoriques documentant la consommation de viande avariée et d'asticots par diverses cultures indigènes, comme les Inuits, qui considéraient ces aliments comme des mets de choix. L'explorateur Knud Rasmussen a notamment décrit en 1931 la consommation de viande de caribou avariée et grouillante d'asticots par les Inuits, qui la considéraient comme une source de nourriture nutritive et savoureuse. Les asticots convertissent la viande maigre en une substance plus grasse, offrant ainsi un repas plus complet et nutritif. Bien qu'il n'existe pas de preuves archéologiques directes de la consommation d'asticots par les Néandertaliens, les preuves chimiques dans les os sont jugées convaincantes. Les chercheurs suggèrent que les Néandertaliens stockaient probablement leur gibier, consommant les parties grasses et la viande vieillie, enrichie par les asticots, afin d'éviter la « maladie du lapin » tout en assurant un apport essentiel en nutriments. Des parallèles peuvent être établis avec des aliments modernes contenant des larves, comme le fromage Casu Marzu en Sardaigne, qui témoigne de l'acceptation culturelle de tels aliments. Cette recherche ouvre de nouvelles perspectives sur l'adaptabilité et la diversité alimentaire des Néandertaliens, les présentant comme des opportunistes culinaires exploitant toutes les ressources disponibles pour survivre et prospérer.